Face à une crise économique qui n’a jamais cessé depuis 2008, la bourgeoisie a partout aggravé le poids de sa domination sur le prolétariat. Les Etats démocratiques comme la France montrent toujours plus la nature dictatoriale de leur système, comme on l’a vu lorsque le président Macron s’est appuyé sur la Constitution pour court-circuiter allègrement les débats des « Représentants du peuple » et imposer l’allongement de l’âge de la Retraite, ou quand toute la droite républicaine a accordé son appui au ministre de l’intérieur Darmanin pour durcir son projet de loi anti-immigrés, rejoignant ainsi la politique chauvine de toute l’Europe. D’ailleurs dans cette démocratie autoritaire qu’est la France, l’extrême-droite a toujours été prête à proposer ses services en cas de besoin : c’est ainsi que les populistes type Le Pen (la fille) se font toujours plus entendre après avoir gardé habilement le silence pendant toute la durée de la lutte contre la Réforme des Retraites.
Le prolétariat n’a par contre jamais cessé de se battre contre l’offensive gouvernementale, avec des manifestations appelées ou non par les syndicats, mais nombreuses et vivantes malgré le caractère de ces directions obsédées par l’amour de la négociation et de la paix sociale. On a vu des grèves avec des tentatives de généralisation et de création de nouvelles organisations, petites mais intéressantes, comme celles des travailleurs les plus exploités et méprisés, les immigrés « sans papiers » et les éboueurs. Grandes ou plus petites, les manifs ont en partie joué leur rôle : non seulement protester, mais unir les travailleurs, leur donner de la joie et du courage, la fierté de se retrouver, comme le disent leurs slogans, « tous ensemble » , de relever la tête et de se mettre tous « debout ». Et cette fois Paris n’est plus seul : en Province, des villes également moyennes et petites ont vu leurs habitants même non politisés descendre pour la première fois dans la rue. Tant est grande la force du nombre et de l’exemple !
Mais alors à quoi a abouti ce beau mouvement ? Avant tout il faut cependant remarquer qu’aussitôt après le sommet du Premier Mai, pour lequel les syndicats avaient promis « une mobilisation sans exemple », le mouvement est retombé, du moins en apparence, dans une débilitante immobilité. Alors que les directions syndicales s’enfermaient dans le silence, les travailleurs et leurs « soutiens » n’ont pas eu la force de continuer la lutte sans avoir été convoqués. Les « gens normaux» , qui avaient commencé à bouger, se sont brusquement arrêtés, effrayés par l’entreprise de terrorisation des médias et la ténacité du gouvernement. Il n’existe pas de véritable débouché politique : les gauchistes proposent seulement de changer de gouvernement (« A la retraite Macron et son monde ! »), et pendant ce temps la Réforme des Retraites a été confirmée.
Cette situation n’a pas de quoi surprendre, elle rappelle même des exemples bien connus du passé. Les miliitants de Mai 1968 , qui proclamaient « Elections piège à cons !» et scandaient « Ce n’est qu’un début, continuons le combat ! », se sont tous retrouvés membres et même dirigeants des appareils de l’Etat bourgeois français, de l’Assemblée au Sénat, ou même des instances gouvernementales européennes.
Naturellement la « Vieille Taupe » de l’histoire continue quand même à creuser, en profitant de toutes les situations, hautes et apparemment basses. Les mouvements d’aujourd’hui manquent pou le moment d’un véritable débouché politique, mais les nouveaux et naïfs manifestants devront apprendre au cours des luttes, même si ce n’est pas automatique, à ne plus croire dans la démocratie (qui se montre pour ce qu’elle est : une dictature acharnée du Capital), et même pas dans les soi-disant amis du prolétariat, y compris déguisés en gens de gauche et d’extrême-gauche.
Tant que le Capitalisme durera, les résultats immédiats, même victorieux, seront toujours repris. C’est pourquoi le marxisme dit que « le résultat le plus important de leurs luttes, est l’union grandissante des travailleurs ». Cela signifie apprendre à voir au delà de l’instant présent et à se sentir une classe, ennemie de la classe bourgeoise dans toutes ses variantes. La spontanéité ouvrière est belle, mais pour être efficace, elle devra s’accompagner de l’union et de l’organisation. Et cela signifie rejoindre le parti de classe, qui n’est pas prisonnier du présent ni du lieu, parce qu’il se rattache aux leçons, à la théorie et aux combats du communisme révolutionnaire international. C’est sur cette ligne que nous nous battons, avec nos forces encore petites, mais résolues et tenaces.