CE QUI DISTINGUE NOTRE PARTI: La ligne qui va de Marx à Lénin, à la fondation de l'Internationale Communiste et du Parti Communiste d'Italie (Livorno, 1921), à la lutte de la Gauche Communiste contre la dégénerescence de l?Internationale, contre la théorie du "socialisme dans un seul pays" e la contre-révolution stalinienne, et au refus des froints populaires et des blcs partisans et nationaux; la dure uvre de restauration de la doctrine et de l'organe révolutionnaires au contact de la classe ouvrière, en dehors de la politique personnelle et électoraliste.


Après la cuite on se réveille avec la gueule de bois. C’est ainsi que à peine connus les résultats des élections, la « gauche » française a dansé toute la nuit du 9 juillet dernier, en suscitant de par le monde l’envie des aspirants imitateurs qui se proposent de la suivre au plus tôt . Mais ensuite… Macron ou pas Macron, Mélenchon ou pas Mélenchon, Le Pen ou pas Le Pen, il faut compter avec les dures lois du Capital, devant lesquelles les petits hommes et les petites femmes du prélude au grand spectacle démocratique doivent s’incliner avec obéissance. Et alors voilà la gueule de bois ! Dans l’ivresse de l’unité nationale à tout prix, de droite comme de gauche, on oublie facilement le passé : on ne voit que la rhétorique superficielle, rien de plus. Donc essayons de le rappeler nous-mêmes.

A l’époque, en France et en Belgique, nos camarades qui avaient survécu à la prison, au bannissement dans les iles, à l’émigration (et à l’élimination physique) surent mener un combat vigoureux contre la énième illusion électorale. Dans des articles et des tracts, ils dénoncèrent le piège infect qui se préparait  dans ces années qui menaient à grands pas vers la deuxième boucherie mondiale : la « menace fasciste » toujours proche, qu’il fallait « combattre » en se « bouchant le nez » et en « donnant la main » aux ennemis d’hier. On sait comment cela se termina : faite de guerres grandes et petites, la deuxième boucherie mondiale arriva de toute façon, avec l’habituel martyre de prolétaires. A la fin les régimes fascistes furent battus grâce à l’intervention des « grandes démocraties occidentales », et ce fut… le fascisme qui gagna, en tant qu’expression et substance réelle de la domination capitaliste. Le reste est connu, et nous amène jusqu’à aujourd’hui.

En mémoire du travail accompli par nos camarades et en raison de son actualité, nous reproduisons l’article « Le front populaire à l’?uvre »,  paru dans le n° 122 (15/09/ 1935) de la revue de l’époque, « Prometeo », diffusée justement en France et en Belgique (ainsi que, clandestinement, en Italie). Rappelons avant tout que :

-  Marcel Cachin, socialiste, se prononça pour l’intervention  dans la Première Guerre mondiale et finança le journal de Mussolini « Il Popolo d’Italia » ; il fut parmi les fondateurs du PCF en 1920 et dirigea pratiquement à vie son organe « L’Humanité » ; Pierre Laval, socialiste, fut quatre fois Président du Conseil entre 1931 et 1944, puis il soutint activement le régime de Vichy et donc la collaboration avec l’Allemagne nazie, et  fut pour cela inculpé et fusillé en 1945 ; Edouard Daladier, du Parti Radical–Socialiste, fut Président du Conseil en 1933 et 1934. Un bel échantillon d’énergumènes, pour représenter le « Front Populaire » !

- Sous les noms de « centrisme » et « centristes » on désignait à l’époque le régime stalinien qui régnait désormais en Russie, et tous ceux qui se reconnaissaient en lui.

- En juillet-août1934, dans les chantiers navals de Brest, Toulon, Le Havre, éclatèrent de puissantes grèves spontanées dirigées contre les mesures anti-prolétariennes contenues dans les « décrets Laval ». « L’Humanité » se hâta de les dénoncer comme l’action de « provocateurs ».

 

Le « front populaire » à l’?uvre

De Cachin à Daladier, c’est-à-dire du parti autrefois communiste à la bourgeoisie « de gauche » représentée par le Parti Radical-Socialiste, on a juré et rejuré que les droits déjà entamés des ouvriers étaient sacrés et inviolables. Le « centrisme » a été le plus acharné à s’efforcer de démontrer que les cabrioles, les compromis, les renonciations au programme communiste, étaient faits uniquement dans l’intérêt de la classe des prolétaires. Ceci dans la période électorale, puis dans la période pré … encore électorale. Le fascisme, voilà l’ennemi ! Et on répond à cette menace non par la mobilisation du prolétariat contre l’origine de ce danger, à savoir le capitalisme, mais en défendant les libertés imposées par la puissante bourgeoisie « démocratique » française, avec un hybride front unique situé au-dessus des classes, rentrant par conséquent dans la ligne du capitalisme. La guerre, ce cauchemar qui pèse sur toute l’humanité et auquel le Parti Communiste aurait dû répondre en renforçant  les liens internationaux des masses opprimées, seules capables de faire obstacle avec leur force révolutionnaire de classe aux plans belliqueux de toutes les bourgeoisies, et en faisant déboucher ces mouvements sur le plan plus élevé de l’insurrection prolétarienne,  détruisant ainsi pour toujours les germes pestilentiels de la boucherie  qui menace encore une fois de bouleverser le monde ! Mais ce parti, autrefois communiste, trouve que sa propre bourgeoisie est « pacifiste » et que la menace de guerre vient… d’au-delà des frontières. Et alors les prolétaires sont invités à reconnaître qu’ils ont une « patrie » à défendre, en se réclamant des traditions de 1789, c’est-à-dire précisément de cette phase des luttes entre deux systèmes oppresseurs dont la bourgeoisie devait sortir victorieuse en instaurant et en consolidant sa domination de classe.

Et tandis que la démagogie embouche ses trompettes, les grandes masses, étourdies et désorientées, après quelques instants d’hésitation, glissent le long de la pente menant à la trahison complète, qui s’exprime aujourd’hui dans le fait de renforcer les armes de la bourgeoisie française et de se ranger sous sa bannière de guerre et de misère, au son de  la « Marseillaise ». On avait rarement pu enregistrer dans l’histoire de la société humaine une tromperie plus perfide et plus raffinée : toutes les luttes, toutes les expériences, toutes les espérances de la classe opprimée étaient ridiculisées, barrées d’un trait de plume, en sanctionnant le compromis final entre les traitres anciens et nouveaux, et ce, dans l’intérêt suprême du capitalisme. C’est ainsi que se formait le « Front populaire » sous le masque démagogique de l’antifascisme et en déclarant aux masses qu’on voulait lutter pour le « droit au pain et à la liberté »….

Peu de jours s’étaient écoulés depuis l’acte officiel et spectaculaire de la trahison (14 juillet) quand les charretées de décrets-lois Laval faisaient leur bruyante apparition. Tous les ouvriers connaissent bien aujourd’hui les effets et la portée sociale de ces décrets. Mais la bourgeoisie pouvait se permettre cette nouvelle attaque parce que les dirigeants de ce « Front populaire » lui avaient offert la garantie qu’ils feraient tout pour empêcher tout geste de révolte de la part des masses. Et c’est sous le masque de la lutte contre le fascisme et pour le pain et la liberté que l’on conseillait aux ouvriers de se laisser affamer, de façon digne et disciplinée. La raison était qu’il ne fallait pas fournir de prétexte au fascisme et que le « Front populaire » était suffisant pour faire respecter les lois et l’ordre du régime « démocratique » capitaliste. Mais la bourgeoisie et les chefs du Front populaire avaient oublié l’essentiel: l’antagonisme de classe qui faisait mûrir la conscience révolutionnaire du prolétariat. En effet, si la plupart des manifestations des salariés de l’Etat avaient pu se dérouler sous le signe du calme et de la dignité, cela ne fut pas possible à Brest et à Toulon, où la provocation et la brutalité de la flicaille démocratique devaient déterminer à leur tour une réponse spontanée et généreuse de la part d’authentiques prolétaires des usines. Et ce fut la lutte, inégale, c’est vrai, dans laquelle l’ouvrier répondait aux armes perfectionnées des pandores avec des pierres et de simples bâtons.

Ces prolétaires, qui offraient à toute la masse exploitée l’exemple magnifique de la lutte, la vraie, celle qui fait trembler la bourgeoisie et ses serviteurs, la seule lutte capable de repousser les attaques du capitalisme affameur et de tenir en respect les bandes fascistes, ces prolétaires qui avaient réagi spontanément à la violence des gardes mobiles s’attendaient à ce que ce « front populaire » fasse sienne cette lutte en l’étendant et en la vivifiant ; au contraire ils se virent d’abord isolés, puis désavoués. Ce que la police n’avait pas réussi à faire avec sa violence féroce fut fait magnifiquement par les dirigeants du « front populaire », qui, incapables de maintenir le calme, provoquèrent la désorganisation et le découragement chez les prolétaires insurgés avec leurs insinuations empoisonnées sur la « provocation fasciste » et les « agents provocateurs ».

A la meute déchaînée des scribes de la bourgeoisie, qui aboyait avec fureur contre ces prolétaires qui avaient osé défendre leur pain et leur vie, s’unit celle des plumitifs et des permanents du « Front populaire ». Ce ch?ur reconnut unanimement que les incidents avaient été le fait d’un petit nombre d’individus « troubles », et que les ouvriers des chantiers étaient restés « calmes » et « étrangers » à la lutte. Ces individus « troubles », cette «  écume » ,  sont des fascistes payés par Laval, car les ouvriers n’auraient jamais osé se défendre des mousquets des gardes-mobiles, qu’ils considèrent au fond comme leurs frères, ils n’auraient jamais pu déchirer le drapeau tricolore ;  ils outragent le drapeau tricolore, que les ouvriers ont placé à leur tête à côté du drapeau rouge dans la journée du 14 juillet («L’Humanité » du 10 août 1935). Résumé d’un pamphlet fasciste ? Non ! Communiqué d’un parti qui ose encore se dire communiste ! Le voici : « Ce sont les agents du 6 février qui ont joué le rôle de provocateurs à Brest et à Toulon ; ce sont eux, les fascistes, qui répandent de fausses nouvelles, en cherchant à tromper les ouvriers pour les faire tomber dans le piège de leurs provocations ; ils ont attaqué les soldats, les gardes mobiles, qui sont les fils d’ouvriers et de paysans ».

Cette claire et infecte prise de position de la canaille stipendiée était suivie de la constitution d’une commission d’enquête pour établir les responsabilités, comme s’il pouvait y en avoir eu d’autres que celles du pouvoir d’Etat.  Les parlementaires « de gauche », y compris les centristes, ont mouillé sept chemises pour embrouiller les ouvriers en leur faisant croire que les individus « troubles » avaient prémédité leur agression contre les petits agneaux inoffensifs de la flicaille, représentante légitime de l’ordre établi, et dans cette diversion raffinée, c’est l’autorité du gouvernement français démocratique qui est présentée aux yeux des masses comme sacrée et inviolable.

Et l’?uvre de ces messieurs a été complète : au lieu d’organiser des mouvements de solidarité et de protestation contre les décrets de faim et de misère, en s’efforçant de rassembler et d’unifier les actions de toute la masse laborieuse, on a isolé ces mouvements en les qualifiant de « suspects » (« L’Humanité » du 10/ O8/ 1935). Les bonzes syndicaux et les élus locaux se sont prodigués non pas pour prendre la tête des masses en révolte, mais pour précher le calme et la discipline, en même temps qu’ils provoquaient la désorganisation avec leur formule insidieuse « attention aux provocateurs ». C’est la pente qui amène à se rendre sans conditions, habilement dirigée par les centristes, les socialistes et les radicaux-socialistes, réunis dans le « Front populaire ». Aujourd’hui face au gouvernement qui a promulgué les décrets de faim Laval, demain face à un gouvernement de l’ex-premier ministre Daladier, et après-demain peut-être face au fascisme, qui, grâce à l’?uvre désagrégatrice des bonzes traîtres, pourra en venir impunément à la destruction totale de toute forme d’organisation prolétarienne. Telle est la tâche que se sont prescrite tous les chefs du « Front populaire », et qu’ils accompliront scrupuleusement en tant que serviteurs du capitalisme. Aux ouvriers qui suivent enthousiastes et confiants l’union sacrée du front contre-révolutionnaire, nous disons de réfléchir, à la lumière de la terrible défaite allemande, à la situation analogue que leurs dirigeants préparent. La voie de la lutte contre les menaces de guerre et contre le fascisme est celle que nous ont indiquée les ouvriers de Brest et de Toulon. Sur cette voie doit se trouver le parti politique de la classe prolétarienne qui, en dehors de tout compromis, de toute forme d’asservissement à des forces étrangères à ses intérêts, de toute forme de corruption, devra savoir unir les efforts et les luttes de la masse laborieuse, aujourd’hui contre les décrets-lois, demain pour la conquête du pouvoir.

Tenez-vous loin du « Front populaire » qui prépare la faim des masses ouvrant la voie au fascisme !

Loin des partis communistes, devenus des instruments au service direct du capitalisme ! Rejoignez les fractions  de la gauche communiste, pour mener un combat efficace contre le capitalisme et tous ses agents !

Pour la révolution prolétarienne !

***

Par rapport à cette époque, ce qui domine aujourd'hui c'est, on le sait, un farce de dernier ordre, avec toute une compagnie de buffons qui se donnent du mal pour jouer la pièce qui leur a été imposée par le capital. Mais prenez garde, prolétaires : la tragédie (répressive, patriotique, belliciste) est déjà là, elle est déjà réalisée, et nous sommes dedans !

                                                                                                                                                                              16. 07. 2024 

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